jeudi 16 mars 2017

Est-ce que même les cercles académiques
s'éveillent à l'évidence ?





par Christopher A. Ferrara
SOURCE : Fatima Perspectives
Le 15 mars 2017

Je viens de rentrer de mon bref séjour à Rome ayant accompagné l'équipe d'intervention rapide du Centre de Fatima, couvrant — ou plus précisément exposant— le sacrilège de la Basilique Saint-Pierre mis en scène par des laïcs Anglicans en costumes de clergé avec la bénédiction du Vatican. Alors que je reprends la rédaction de ma chronique quotidienne, un article du site The Federalist a attiré mon attention.

Le titre et le sous-titre suggèrent à eux seuls un développement majeur potentiel dans les cercles académiques dominants relativement à ce qui passe pour le conservatisme en Amérique aujourd'hui : « La religion séculière » et l’« Impossibilité de la liberté religieuse : le Progressisme cohérent est intolérant. Le Christianisme cohérent est tolérant ».

L'auteur de cet éditorial est Monsieur Christopher A. Ferrara. Monsieur Ferrara est avocat de profession. Il agissait aussi comme collaborateur principal de Feu Père Nicholas Gruner, fondateur du Centre de Fatima, Fort Érié, Canada et ayant aussi des installations à Rome. Il est chroniqueur dans plusieurs autres sites catholiques dont Le Remnant Newspaper.

L'auteur de l’article, David Walker, cite un essai du légendaire conservateur Américain Andrew Sullivan dans lequel Sullivan déplore la montée de « l'intersectionnalité », une nouvelle théorie dans les cercles académiques libéraux qui regroupent diverses classes protégées, y compris la race, le sexe et l'« orientation sexuelle » en une seule grande victime de l'intersection d'une grande conspiration oppressive croisée par une « hiérarchie et un pouvoir amorphes ». Sullivan observe que l'intersectionnalité est juste la rectitude politique sous un nouveau nom :

« [ Elle ] fonctionne, selon les mots d'Orwell, comme une « petite orthodoxie malodorante » et elle se manifeste, me semble-t-il, presque comme une religion. Elle postule une orthodoxie classique à travers laquelle toute l'expérience humaine est expliquée — et par laquelle toute parole doit être filtrée. Sa version du péché originel est le pouvoir de certains groupes d'identité sur les autres. Pour surmonter ce péché, vous devez d'abord vous confesser, c'est-à-dire « vérifier votre privilège », et ensuite vivre votre vie et ordonner vos pensées d'une manière qui maintient ce péché à distance ».

Walker considère à juste titre l'intersectionnalité comme une autre manifestation de la religion séculière qui a été imposée à l'esprit public par ce que les Modernes appellent la liberté, mais que le Magistère de l'Église Catholique, pour citer le Pape Léon XIII dans Immortale Dei, considère « ce droit nouveau, inconnu jusqu'alors, et sur plus d'un point en désaccord, non seulement avec le droit Chrétien, mais avec le droit naturel ».

Walker écrit que l’article de Sullivan « cadre exactement avec mes propres pensées sur la façon dont la liberté et la liberté religieuses sont incompatibles dans des contextes sécularisés et progressistes ». Cette liberté, soi-disant, est l'ennemie de la vraie religion et elle doit effectivement chercher à éradiquer la vraie religion, c’est précisément la thèse de ma propre étude, publiée il y a cinq ans, à la montée de la « Liberté, le dieu qui a échoué ».

La conclusion, dit Walker, c’est, ce qu’il défendra dans sa thèse de doctorat, sera que « sans une considération pour la transcendance et le jugement éternel, un écosystème durable de la liberté religieuse est impossible à maintenir ». Ou, comme mon collègue Samuel James m'avait tweeté après avoir partagé l'article de Sullivan : « C'est presque comme s'il y avait quelque chose dans l'âme humaine qui aspire à la vérité objective et transcendante ». C’est vraiment cela.

Il serait facile d’être condescendants envers des universitaires conservateurs qui ont trébuché dans le passé et qui sont maintenant à explorer la vérité évidente au sujet de l'homme enterrée depuis près de 300 ans de règne de la Liberté. Mais il faut dire que ce qu'ils ont découvert était connu de tout enfant Catholique fondamentalement catéchisé avant la grande confusion qui suivit le Concile Vatican II, avec ses propres ambiguïtés, sans fin débattues et donc sans autorité, de la notion moderne de la « liberté religieuse ». »Pour citer le Catéchisme de Baltimore :

« Pourquoi Dieu t'a-t-il fait ?

« A. Dieu m'a fait Le connaître, L’aimer et Le servir en ce monde et être heureux avec Lui pour toujours dans le Ciel ».

Si nous sommes faits pour aimer et servir Dieu dans ce monde et être heureux avec Lui au Ciel après que cette vie terrestre soit terminée, il s'ensuit nécessairement que l'autorité civile, dans sa sphère de compétence, doit aider l'individu, en alliance avec l’Église, dans la réalisation de ses fins divinement instituées. C'est ainsi que le Pape Saint Pie X a condamné l'erreur moderne de « séparation de l'Église et de l'État » parce qu'elle limite l'action de l'État à la poursuite de la prospérité publique au cours de cette vie et qui ne constitue que l'objet immédiat des sociétés politiques ; et l'État ne s'occupe d'aucune manière (en plaidant que cela lui est étranger) du but ultime qui est le bonheur éternel de l'homme après que cette courte vie aura couru son cours.

Comme le disait Saint Pie X :

« Et pourtant, l'ordre présent des choses qui se déroulent dans le temps se trouvant subordonné à la conquête de ce bien suprême et absolu, non seulement le pouvoir civil ne doit pas faire obstacle à cette conquête, mais il doit encore nous y aider ».

Triste à dire, cependant, Walker trébuche dans son application de ses « aspirations à la vérité transcendante » à la société politique. Il écrit :

« Ce sont les principes de ma théorie :

  1. Le jugement absolu est réel ;
  2. Le jugement absolu n'appartient pas aux affaires humaines actuelles (c'est-à-dire au gouvernement) ;
  3. Le jugement absolu appartient à Dieu ;
  4. Le jugement absolu se produit à la fin de l'histoire et ne peut être réalisé dans le présent.

Au contraire, les absolus moraux et religieux révélés par Dieu appartiennent bien aux affaires humaines actuelles et les jugements selon ces vérités ne sont pas reportés à « la fin de l'histoire » mais doivent être faits par l'autorité civile pour le maintien du bien commun qui comprend la protection des âmes contre la propagation de l'erreur. Comme l'enseigne le Pape Léon dans Libertas, son encyclique historique sur la vraie liberté humaine :

« Le vrai, le bien, on a le droit de les propager dans l'État avec une liberté prudente, afin qu'un plus grand nombre en profite; mais les doctrines mensongères, peste la plus fatale de toutes pour l'esprit ; mais les vices qui corrompent le coeur et les moeurs, il est juste que l'autorité publique s’emploie à les réprimer avec sollicitude, afin d'empêcher le mal de s'étendre pour la ruine de la société...

« Accordez à chacun la liberté illimitée de parler et d'écrire, rien ne demeure sacré et inviolable, rien ne sera épargné, pas même ces vérités premières, ces grands principes naturels que l'on doit considérer comme un noble patrimoine commun à toute l'humanité. Ainsi, la vérité est peu à peu envahie par les ténèbres, et l'on voit, ce qui arrive souvent, s'établir avec facilité la domination des erreurs les plus pernicieuses et les plus diverses. Tout ce que la licence y gagne, la liberté le perd ; car on verra toujours la liberté grandir et se raffermir à mesure que la licence sentira davantage le frein ».

Walker méconnaît la nature de la tolérance Chrétienne. Il est faux de déclarer simplement que « le Progressisme cohérent est intolérant. Le Christianisme cohérent est tolérant ». Dans le contexte de la société politique et de la vie publique, le Progressisme et le Christianisme sont intolérants. La différence est que le Progressisme est intolérant à la vérité alors que le Christianisme est intolérant à l'erreur dans la mesure où sa promulgation publique menace la Foi, la morale et le bien-être éternel des âmes. Cela ne veut pas dire que dans une République Chrétienne toutes les manifestations publiques de l'erreur doivent être immédiatement écrasées, mais plutôt que la prudence politique dicte une intervention de l'autorité civile lorsque la promulgation de l'erreur menace la moralité publique ou la Foi du peuple.

Même aujourd'hui les vestiges de ce principe restent dans la punition pour libelle diffamatoire ou dans de faux discours commerciaux. Il est absurde de nier son applicabilité aux mensonges qui menacent les fondements de la morale publique et le bien-être éternel des âmes.

Si notre civilisation n'avait pas abandonné l'intolérance des manifestations publiques concernant les erreurs contre la Loi de Dieu et la vraie religion, comme le plaidoyer ouvert du meurtre des enfants dans le sein de leurs mères et même le satanisme, elle n’expérimenterait pas présentement l'intolérance seulement de la vérité qui nous rend libres. Nous supportons maintenant l'extrême gravité finale de la tolérance de l'erreur. Pour rappeler les paroles du Pape Léon : « La vérité est peu à peu envahie par les ténèbres, et l'on voit, ce qui arrive souvent, s'établir avec facilité la domination des erreurs les plus pernicieuses et les plus diverses ».

L'intolérance n'est donc pas le problème. Le problème est une perte radicale de l'objet propre de l'intolérance qui, pour citer le Pape Pie XII, est « ce qui ne correspond pas à la vérité et à la norme de la morale » et qui « n'a objectivement aucun droit à l'existence ou à la propagande ou à l'action ». (Allocution au Congrès des Juristes Catholiques Italiens, 6 décembre 1953)

Walker et d'autres conservateurs à l’esprit semblable se sont réveillés au péril de la liberté moderne. Maintenant, ils ont besoin de reconnaître la seule évasion possible de ses griffes : la restauration de la République Chrétienne dans laquelle la vérité est défendue et où il n’est donné aucune place à l'erreur quand elle menace le bien commun. Les Catholiques voient cette restauration dans l'inéluctable triomphe du Cœur Immaculé de Marie.

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